Et l'ange tomba à terre {14-20 mai} | Flippazem

Et l'ange tomba à terre

Cela faisait maintenant plusieurs jours qu’Erëm avait beaucoup de mal à tenir. Trois semaines étaient passées depuis l’attaque sur l’ISMADD, l’organisation était totalement réparée depuis deux semaines. La force de l’ange cependant, au fur et à mesure des missions et de la transformation s’amenuisait. Il sentait qu’il avait plus de mal à maintenir sa transformation, qu’il était fatigué, qu’il avait quelques absences et il ne pouvait même plus dormir transformé, il était obligé de recouvrer sa forme originelle chaque nuit pour ne pas perdre ses forces trop vite. Pour autant il n’avait rien dit à l’ISMADD et ses médecins -normal me diriez-vous- et il acceptait toujours ses missions même si ses partenaires avaient remarqué sa fatigue.

Aujourd’hui était particulièrement difficile, après tout il ne lui restait qu’une semaine de punition et le Conseil n’avait pas choisi la durée au hasard. Ils savaient très bien combien de temps un ange pouvait tenir, et cette douleur était la punition d’Erëm. Il y trouvait néanmoins un certaine forme d’illogisme : pourquoi lui donner cette punition qui pouvait risquer de le faire découvrir s’il s’évanouissait ? Ou bien testaient-ils sa persévérance ? Etait-ce juste un jeu cruel qui visait à voir combien de temps il tiendrait avant qu’il ne s’évanouisse devant des gens et qu’ils soient donc obligés de tuer ou d’emprisonner Erëm pour sa faute ?

Toutes ces pensées se diffusaient dans son esprit, plus ou moins clair, peu assuré, alors que l’agent de l’ISMADD était dans l’ascenseur. Flippy lui avait demandé de passer pour lui donner des documents, certainement pour une prochaine mission. C’est avec une appréhension vis à vis de l’attitude de ce dernier qu’il passa les portes de l’ascenseur et qu’il marchait dans les couloirs. Erëm était essoufflé, il devait s’arrêter de temps en temps car sa tête lui tournait, posant sa main sur les murs pour se tenir. Il était à peine dix heures du matin et Erëm ne savait pas encore comment il allait terminer cette journée.

En voyant enfin la porte de Flippy il eut comme un soulagement… Enfin il était arrivé et il allait pouvoir se poser.. Néanmoins son corps ne donna pas tout à fait raison à ses intentions… Le flou de sa vue s’intensifia et l’on entendit bientôt un simple « bim » d’un corps qui tombe contre sol. Erëm venait de s’évanouir, laissant ainsi sa forme originelle reprendre sa place. Heureusement, peut-être, ses ailes n’étaient pas présentes.

Passage de la patrouille dans cette zone : dans trois minutes.

Oups ?

Et l'ange tomba à terre

L’ange avait cogné le sol, la tête la première, il n’avait même pas été capable de se rattraper ou de se protéger… Enfin, il n’aurait peut-être qu’une petite marque à la tempe. Il était inconscient cependant l’on pouvait voir qu’il avait bien du mal à respirer, il était pâle et ses inspirations ne semblaient guère suffisantes à ce dont il avait besoin.

Trois heures plus tard, Erëm ouvrait enfin les yeux à nouveau, n’ayant absolument aucune idée d’où il se trouvait, ni de ce qui s’était passé entre son évanouissement et maintenant. Sa vision n’était pas bien nette au départ. Les néons étaient allumés, il reconnaissait le plafond sans le mettre en mot. Une ou deux minutes s’écoulèrent quand enfin il se rendait compte de ses propres cheveux roux et sursauta, se relevant il n’était pas arrivé chez Flippy en marchant, il le savait, alors, qui l’avait vu ainsi et amené… ? Il ne du que tourner la tête pour voir la forme qui se tenait à côté de lui, en train de dormir contre le canapé et sa respiration se calmait enfin.

« Flippy-sama… »

Ce dernier semblait dormir à poing fermé. Erëm était certain qu’il n’avait aucunement dormi de toute la nuit comme d’habitude. Cela faisait longtemps que l’ange ne s’était pas trouvé aussi proche de lui. Le chef de la section l’évitait soigneusement depuis leur mésaventure… Si bien qu’il n’était ni au courant de sa punition et de son état. Il se demandait s’il lui pardonnerait un jour.

Bien qu’il en eût envie il était préférable qu’il ne s’attarde pas dans son bureau, il ne voulait pas d’engueulade outre mesure. Se relevant du canapé, ses jambes ne le tenaient pas très bien mais Erëm pensait naïvement que cela irait. Il posa une couverture sur Flippy avant de faire quelques pas et de reprendre son apparence de démon et de vouloir franchir la porte. Vouloir uniquement car quelques secondes après la transformation, il tomba à nouveau à terre et retrouva son apparence angélique. Sa respiration était à nouveau douloureuse.

« Kof, kof, kof ! »

Il ne pouvait s’empêcher de tousser. Comment allait-il faire pour justifier à l’ISMADD de ne pas pouvoir travailler durant encore une semaine ? Comment allait-il quitter la pièce sans déranger Flippy ? Comment allait-il ne serait-ce que pouvoir rejoindre sa chambre ? Sur les genoux, au sol, voilà toutes les questions qui parcouraient son esprit.

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Alors qu’il toussait, l’ange sursauta dès que le Flippy l’appelait par son prénom. Le vrai, pas celui qu’il avait donné à l’ISMADD… C’était encore plus surprenant… Le rouquin ne mis pas longtemps pour rejoindre celui qui était à terre pour lui demander s’il allait bien et ce qu’il faisait par terre. De toute évidence pas grand-chose de constructif…

« Je… Je vais bien… »

Ouai… Qui allait bien croire cela ? En tout cas, ce n’était certainement pas Flippy et personne d’autre d’ailleurs… Il faisait peur à voir pour un ange soit disant fort, soit disant « presque » immortel, ou vu ainsi par les humains… A vrai dire Erëm ne s’attendait pas à ce que Flippy s’inquiète et se laissait faire quand il lui prit le menton, rougissant un peu, l’observant réfléchir. Dans une approche purement humaine de son problème il posa sa main sur son front. Malade hein ? Au final, ce n’était pas si faux. L’on pouvait dire qu’il avait une carence d’exaltation. C’était l’expression angélique retranscrite…

L’archange hésita un instant : devait-il accepter son aide ? Avait-il un autre choix de toute manière ? Il ne pouvait pas retourner dans sa chambre de toute façon… Il s’appuya donc sur Flippy pour pouvoir retourner dans le fameux canapé…

« Merci… »

Alors qu’il lui faisait la tête depuis presque trois mois le rouquin lui annonça qu’il pouvait rester là, sous son apparence angélique qui plus est…

« En effet…. Je ne sais pas ce qu’il se serait passé autrement… »

Sa mise à mort sans aucune forme de procès et l’attaque de l’ISMADD, l’assassinat de tout ceux qui avaient découvert qui il était ou qui avaient des doutes sur l’existence des anges…

Bon… il était peut-être temps d’expliquer à notre Flippy pourquoi il se sentait si mal. Erëm tenta de s’asseoir sur ledit canapé mais au final, il était mieux assis…

« Je suppose que l’on peut dire… que je suis malade. Ou en carence comme diraient les médecins… Carence qui est du à un manque d’exaltation c’est l’équivalent du miasme des démons… Je ne peux plus maintenir mes transformations longtemps ou vraiment utiliser mes pouvoirs. »

Il n’avait pas très envie de venir sur le pourquoi du comment il était en carence, mais il savait qu’il le dirait s’il lui posait la question. Et si Flippy avait bien suivi ses leçons de miasme chez les démons, il pouvait savoir qu’un manque de miasme, à terme, serait forcément mortel.

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Bien sûr que Flippy devait se poser des questions et il ne tarda pas à les verbaliser. Dans sa tête, Erëm avait encore le droit d’aller au paradis, et c’était bien normal qu’il ne le sache pas car l’ange ne lui avait rien dit. Et ce n’était pas que parce qu’il l’évitait, c’était aussi parce qu’il ne désirait pas parler de ce genre de chose. Bien qu’il assumait ses erreurs il trouvait cruel d’être laissé ainsi. Il ne savait plus non plus s’il pouvait compter Flippy dans ses alliés et n’avait plus envie d’y mettre les anges. Au final, depuis ce qu’il s’était passé Erëm ne pouvait s’empêcher de ressentir une profonde solitude.

« Non je ne peux pas. Depuis… Ce qu’il s’est passé… » Il n’était pas bien difficile de deviner de quoi Erëm parlait. « J’ai été convoqué à un conseil qui m’a interdit de revenir au paradis avant le 20 mai. »

C’était un peu comme lui dire que la terre serait pendant trois mois sa prison. Prison qui fonctionnait vu qu’il s’affaiblissait a vue d’œil et pour tenir les jours qui lui restaient, il n’avait pas intérêt à continuer d’utiliser sa transformation à moins de vouloir y mourir.

« Je ne pense pas pouvoir continuer comme ça… Et je dois forcément travailler… Sinon l’ISMADD se demandera où je suis passé… »

Avec ces phrases il n’attendait pas forcément une proposition, à vrai dire, il n’était pas certain de les avoir dites ou non, sa tête ne tournait plus très rond…

Erëm toussa un peu puis soupira. Plus il perdait son exaltation, plus il ressentait que l’air humain n’était pas fait pour lui ni pour aucun ange. Cela ne put que lui ouvrir les yeux : pourquoi infiltrer un monde dans lequel l’on ne peut pas vivre ? Pourquoi Lilith désirait-elle le monde humain alors qu’eux aussi avaient ce problème ?  

Et l'ange tomba à terre

« Tu n’aurais pas dû me sauver. »

Comment ça ? Bien sûr que si ! De simples paroles pouvaient être parfois si dures à entendre, pour autant l’ange ne regrettait pas ses gestes, s’il avait dû le refaire, il aurait même agit plus tôt, il aurait fait en sorte que tout se passe pour le mieux. Il voulait que Flippy vive. Tout cela, il aurait voulu le lui dire mais son esprit si embrumé n’était que peu capable de décrocher des mots et de faire des phrases complexes. Seul un scintillement de ses deux pupilles bleues montrait à quel point il donnait tort à Flippy.

Erëm se contenta d’observer Flippy qui se redressait. A quoi était-il en train de réfléchir ? L’archange se contenta d’hocher la tête à ses dires. Se reposer ici lui convenait très bien. Il n’était de toute façon pas en état de faire quoi que ce soit d’autre, même marcher était compliqué. Il se recoucha aussi tranquillement et doucement qu’il le pu. Il ne s’était jamais senti ainsi, pour un ange… C’était comme avoir sa première grippe.

A moitié réveillé il écoutait le plan qui commençait à se dessiner. Le cacher pendant une fausse ou une vraie mission. Le problème étant qu’il devrait se montrer face aux caméras. Mais pour cela il devait attendre car il devait forcément se faire voir des caméras.

« Je devrais pouvoir… Si je me repose… »

Et ni une ni deux, l’ange sombra à nouveau dans le sommeil. Cela dura un peu plus de deux heures avant qu’il n’ouvre à nouveau les yeux. Il se sentait moins étourdis mais le sommeil ne lui ferait pas récupérer son exaltation, seul le paradis le pouvait. Ou un allié qui accepterait de lui donner de son exaltation. Mais aucun de ses confrères n’accepterait de trahi les décisions du conseil…

« Est-ce que vous avez trouvé… Ce que je pourrais faire… pendant ces jours restants ? »

Doucement, Erëm se redressa. Il avait tellement envie de retourner au paradis pour se sentir mieux… mais tellement envie de tous les fustiger aussi…

M’enfin, dans tous les cas, dès que le plan fut énoncé, l’ange ne tarda pas à se mettre à exécution en utilisant ses dernières forces.

Et l'ange tomba à terre

Dès qu’il avait repris ses esprits, Erëm avait fait de son mieux pour s’activer tant qu’il le pouvait encore. C’est encore en tremblant qu’il prit le dossier que lui tendait son supérieur et qu’il en feuilletait les pages tout en étant. Si on devait lui poser des questions, au moins, il saurait un peu y répondre. Hochant la tête l’ange se leva doucement, titubant encore un peu. Flippy avait déjà fait tout ce travail ? Quel soulagement… Lui n’aurait été capable de rien… Mais il ne pouvait pas s’en vouloir car même s’il n’osait pas le dire, son état était préoccupant, et s’il continuait d’utiliser ses pouvoirs ainsi, il mourrait avant les derniers six jours.

« Bien compris… Je vais faire de mon mieux… Oui… Je vais y aller tant que j’en ai encore la force. Merci… »

Il respira encore un moment avant de reprendre son apparence de démon… C’était déjà épuisant, mais il devait le faire, pour survivre. Alors après un regard il s’en alla, effectuant les dernières démarches, tâchant au possible de n’effrayer personne avant de se rendre au hangar.

~~~

Dès qu’il s’était arrivé sur les lieux, en franchissant la porte, Erëm s’était à nouveau évanoui. Il se rappelait juste du contact du sol froid… Et se surpris à s’être réveillé dans le lit. L’aube était présente quand il ouvrait les yeux. Dès son réveil il toussa un peu, sa respiration était sifflante et il avait mal aux poumons. D’instinct il posa une main dessus avant de se rendormir….

~~~

Deux jours avaient passés et il n’avait fait que se réveiller deux minutes lorsque sa respiration était coupée puis s’évanouir à nouveau. Cette fois, il lui semblait avoir un peu moins mal.

« Hm… »

Fébrilement, il se sur-éleva légèrement. Sa vue était encore brouillée… Il ne sentait pas les jours passer mais sentait le temps influencer son état de santé…

« Flippy-sama… Combien de jour… ? »

Dans le grand lit, ses ailes étaient présentes, n’ayant pas non plus la force de les camoufler, il devait garder toute sa force pour tracer le portail pour rentrer… Il lui avait semblé voir une forme mais il n'en était pas certain.. Au pire il aurait juste parlé tout seul.

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Erëm ne s’était pas attendu a une réaction aussi vive, et encore moins à ce que Flippy utilise aussi naturellement son réel prénom. Après la tête qu’il lui avait fait ces derniers temps cela ne pouvait que lui faire plaisir, que l’on s’inquiète réellement pour lui. Difficilement, dans le coltard, l’ange avait articulé sa phrase et le rouquin était tout de suite venu vers lui. Cela faisait donc deux jours qu’il dormait ? Le temps avait passé si vite, il espérait que cela continuerait ainsi…

« Ne… Ne vous en faites pas… ça… ça va aller… » Difficilement, il se mit un peu mieux sur l’oreiller « Si je n’utilise pas mes pouvoirs… ça ira… Je… » Il toussa… Parler n’était pas facile quand on manquait d’air… « L’exaltation est comme votre oxygène… Un appareil n’irait pas… Et je… Je veux bien de l’eau. »

Déjà qu’il avait mal aux poumons, si en plus sa gorge était sèche, c’était encore plus désagréable. Alors, quand Flippy arriva avec de l’eau il bu un peu, soupirant, cela lui fit du bien et même si cela n’améliora pas son état, c’était toujours un mieux…

« Le 20… à minuit. Réveillez-moi…. Criez-moi dessus s’il le faut… »

Les anges avaient dit le 20. Ils n’avaient pas spécifié d’heure, alors cela pouvait être en la première minute et Erëm comptait bien en profiter.

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L’archange ne tarda pas à s’évanouir à nouveau, ou à s’endormir, voire, les deux. Il était difficile de savoir dans quel état il se trouvait. De temps en temps, lorsqu’il se réveillait, il quémandait un peu d’eau… Ses sommeils étaient dénués de rêve, il avait l’impression d’être en transe de temps en temps, d’avoir quelques images, il avait chaud et froid et sa température corporelle avait un peu baissée pour économiser ses forces.

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00h00. 20/05/15

L’heure et la date affichée sur le réveil.

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Erëm n’avait eu aucun problème à croire aux dernières paroles de Flippy qu’il avait entendues, sombrant ensuite dans un sommeil aucunement réparateur. Il était en effet capable de louer un orchestre au besoin… Alors Erëm put se rendormir sans aucun risque, Flippy saurait quoi faire, même s’il savait qu’il s’inquiétait. Il n’entendit aucunement le chef de pôle jouer de son instrument, ni les touches de l’ordinateur ou bien les divers bruits aux alentours.

Et ce jour, sans que l’archange ne le sente, arriva enfin. Nous étions le 20 mai 2020, minuit : la punition était enfin levée. Pour cela il fallait encore que le rouquin se réveille. Bien évidemment, il n’entendait absolument rien. Même quand il s’éclaircit la gorge pour parler plus fort. Ou quand il tenta de le secouer. Quand il lui enfila le casque il ne sentit rien. Cependant, dès que le bruit si fort du klaxon le fit se réveiller en sursaut, enlevant directement le casque dès qu’il l’eut dans la main.

« Kof, kof, kof ! Hm… Merci.. »

S’il avait été conscient il aurait bien hurlé… Mais là il était encore tout droggy… Il se massa un instant le crane… Et c’est tremblant, en s’aidant du lit qui se sur-éleva lentement, avant de se mettre debout. Doucement il souffla. Il n’allait pas mourir dans la minute, cependant, il ne devait pas perdre de temps. Le bout de ses doigts s’illumina de blanc, et, en traçant le portail, il grimaça. Quelle horreur ce portail. Complexe et plus grand que les autres. Il prit son temps pour ne pas se tromper, histoire de ne pas devoir recommencer. Bien évidemment, il lui était bien difficile de se concentrer dessus alors que son esprit était embrouillé, il ne devait pas trop réfléchir, car, même s’il était complexe, il l’avait tracé tellement de fois que son bras et ses doigts connaissaient par cœur les mouvements à effectuer. Le tout dura cinq bonnes minutes de suspens…

Avant que le portail ne s’illumine enfin.

Perdant un peu l’équilibre, il s’appuya sur Flippy, s’excusant un peu du regard… Avant d’enfin passer le portail en sa compagnie.

Les voilà arrivés sur Genesis, sur le gros ilot à l’ouest de l’ile majoritaire qui faisait office d’entrée. A la première bouffée d’air du paradis, Erëm tomba à terre, ses poumons le brûlaient et il avait apposé sa main au niveau de ceux-ci. Tous les pores de son corps s’étaient ouverts -invisibles à l’œil nu-, et l’on pouvait distinguer une fine fumée qui rentrait dans son corps et autour de lui. Sa peau elle aussi devenait brûlante… Il toussait tout en prenant quelques bouffées, ayant du mal à respirer cet air auquel ses poumons n’étaient plus habitués…  Pour autant, il ne perdait pas conscience et reprenait même quelques couleurs.

Erëm n’avait porté aucune attention à la garde qui venait vers eux, trop concentrée pour respirer. Consciente de ce qui devait se passer, et après avoir vérifié visuellement la présence du bracelet doré sur Flippy, cette dernière tendit un masque à l’humain. En respirant l’air du paradis quelques minutes, il devait bien avoir compris la différence avec son atmosphère… Et peut-être la souffrance d’Erëm.

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Erëm n’était pas vraiment en capacité de répondre à la question de Flippy. De toute façon, c’était à peine s’il l’avait entendue, beaucoup trop concentré sur sa respiration, sur ses autres sens, sur le rythme de son cœur qui avait soudainement accéléré et qui lui tapait dans les oreilles. Et pour une fois, il n’était pas dérangé par la proximité de Flippy, au contraire, elle le rassurait. Le chef de pôle le tenait et il en faisait de même, resserrant sa poigne au rythme de sa toux.

Sa deuxième remarque, il avait pu l’entendre. Il ne fumait pas vraiment mais il doutait que Flippy soit tout à fait sérieux ou qu’il ait déjà pu assister à ce genre de phénomène.

« C’est l’exaltation… Qui rentre dans mon corps… C’est normal… Kof, kof, kof ! »

Heureusement, Flippy pu récupérer un masque. Et personne ne l’avait embroché pour être venu, cela voulait dire qu’il n’était en effet pas interdit de revenir à la première minute du jour.

Plusieurs longues minutes passèrent pendant lesquelles Erëm s’attelait à respirer le mieux possible. Les gardes ne semblaient pas réellement lui porter assistance. L’atmosphère était un peu gênante (au sens figuré, cette fois) car ces derniers savaient à peu près pourquoi il avait été puni. Erëm ne leur demanda pas non plus de l’aide, tant qu’ils n’attaquaient pas Flippy, cela lui allait très bien. Prenant quelques légères respirations il annonça ensuite.

« Je vais vous emmener chez moi… Si vous en avez envie. »

Erëm n’avait pas envie de rester à l’entrée du Paradis comme un idiot. Alors il traça fébrilement le cercle. Il ne se sentait pas de voler. Le cercle était directement à l’intérieur de sa maison, il ne voulait pas réveiller le voisinage, surtout que son voisin eh bien, il s’agissait de son père. Lui faisant signe d’entrer dans le portail, Erëm le suivit. La lumière était bien évidemment éteinte, alors il l’alluma. La maison était un peu poussiéreuse, quoi de plus normal, cela faisait trois mois qu’il n’y avait pas mis les pieds.

Ils étaient actuellement dans le salon, plutôt grand, contrairement à la chambre d’Erëm qui ne faisait qu’office d’endroit pour dormir, une cuisine ouverte avec presque rien dans les placards, excepté des fruits et légumes secs, une salle de bain et un grand placard incrusté où il rangeait diverses tenues : humaines, angéliques, de travail ou non. Il y avait des photos sur les murs et sur les commodes. L’on pouvait notamment voir Erëm plus jeune, avec ses parents, brandissant son diplôme d’ange puis d’archange, en compagnie d’Ophiel, de ses collègues des affaires humaines, d’Ezekiel... Les deux diplômes tenus étaient accrochés fièrement dans le salon.

« Vous pouvez faire comme chez vous… »

Par la grande fenêtre de sa cuisine, l’on pouvait voir la lumière s’allumer dans la maison en face de chez lui, un homme regarder rudement les résidents avant d’éteindre la lumière. Erëm avait juste croisé son regard avant de détourner la tête et de soupirer et… d’aller faire du thé et de prendre les fruits et légumes secs pour les disposer sur la petite table de salon avant de s’asseoir (ou plutôt s’affaler) dans le canapé. Il servit le thé à Flippy et en prit lui aussi… Cela lui ferait sans doute beaucoup de bien.

Pour attirer la curiosité de Flippy, il y avait divers appareils angéliques dans les environs, dont quelque chose qui ressemblait bien fortement à une tablette. Diverses armes étaient aussi exposées dans le placard ouvert.

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Erëm ne comprenait pas vraiment l’attitude de Flippy. Ce n’était pas vraiment dans son genre d’être sentimental. Enfin, de ne pas être dans l’excès de sentiment qui étaient plus un mensonge (ou une demi-vérité ?) qu’autre chose… Là le rouquin avait l’air plutôt sincère et c’était ça qui était dérangeant, qu’il s’excuse parce qu’il ne faisait rien alors qu’Erëm n’était même pas encore remis. C’est après lui avoir dit de se reposer et de ne pas s’occuper de lui qu’il lui expliquait qu’il n’était pas doué pour faire attention aux gens. Erëm haussa un sourcil. Ca, il l’avait remarqué, pour autant… Pour autant ce n’était pas le genre du Flippy qu’il connaissait de parler ainsi…

Et puis, le sujet changea brusquement, et là, on avait déjà les airs du Flippy de ses souvenirs, curieux de tout, et surtout de la technologie…

« Je vais bien… » Plus beau comme mensonge était peut-être de dire qu’il était heureux. « Et puis je vous ai un peu forcé à venir alors… Kof kof… »

Sans Flippy il savait que l’entrée serait encore plus difficile… Là… Ca ne s’était pas mal passé, ni bien non plus.

Se levant en s’appuyant contre le dossier du sofa, Erëm alla chercher la tablette puis revint. Allumant l’objet, il la configura en anglais – parce que oui, étant donné qu’elle lisait les clefs usb, elle devait forcément avoir un clavier anglais- avant de la tendre à Flippy et de se poser à nouveau sur le canapé.

« Ce n’est qu’une machine à écrire. »

Certains dossiers, notamment les confidentiels, étaient écrits en angélique. Il y en avait d’autres en anglais, des travaux de fins d’étude concernant les langues et les technologies humaines qu’Erëm avait écrit à l’époque. La machine comprenait plusieurs dossiers, dont un seul était écrit en anglais « English » et qui contenait lesdits fichiers… Comme par exemple « Les avancées de la technologie humaine de 1450 à 1800 », « Napoléon Bonaparte », « Les locomotives à vapeur » (si, si), « Ophiel Vaal’ara » et bien d’autres. Un autre dossier était lui en démonique, et comprenait quelques fichiers suivants : « Le règne de Belial », « Les avancées législatives du règne de Satan : la fin de l’esclavage», « Les politiques du règne de Lilith », etc. Dans les faits, rien que Flippy n’avait pas le droit de consulter.

Laissant Flippy chercher, il buvait de son thé et grignotait. Après tout, lui n’avait pas mangé depuis plusieurs jours – ce qui se serait avéré inutile de toute façon- et avait en effet besoin de repos. Alors il se mettait tranquillement dans son canapé, restant disponible pour son invité…

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Il était vrai qu’excepté cette tablette (qui ressemblait finalement aux tablettes humaines dans un design différent, et qui n’étaient pas d’une marque aussi célèbre que celle d’un fruit), ainsi que des bracelets qui empêchaient les anges d’utiliser leurs pouvoirs, il n’y avait rien de vraiment technologique ici, donc certainement pas le paradis de Flippy. Pour autant il était tout de même curieux, comme n’importe qui l’aurait sans doute été à sa place. Malgré sa déception apparente, cela ne l’empêchait pas de fouiller les différents dossiers. Il s’agissait en effet de divers exposés, écrits par la main d’Erëm il y a plusieurs siècles de cela (deux, pour être exact) qu’il conservait avec nostalgie du temps de son passage à l’académie.

« On peut voir ça comme ça. J’ai laissé certains de mes travaux. »

Il l’utilisait encore pour synthétiser ses recherches même si la bête n’avait pas démarré depuis quelques mois… On se demandait bien pourquoi. Il avait presque oublié le travail qu’il avait fait sur Ophiel et fût un peu surpris de la demande. Mais Flippy avait toujours été bien trop curieux. Le dossier était une interview, en anglais, pour en apprendre plus sur Ophiel, sa formation et son travail et pourquoi il avait choisi d’être conseiller.

« Oh ? Oui. C’est un des anciens Conseillers des affaires humaines. »

En disant cela, Erëm réalisa qu’en fait Flippy ne connaissait pas du tout l’organisation du Paradis.. Peut-être devait-il y remédier ? De toute façon si ça ne l’intéressait pas, il le couperait bien vite. Et puis, il avait le droit de savoir, Raphaël ne l’avait pas interdit… Il toussa un coup et bu un peu de thé avant de s’y remettre.

« Nous avons six Conseillers. L’équivalent humain… Je dirais qu’il s’agit des ministres. Ils s’occupent chacun d’un grand domaine. Vous avez, l’armée, les tactiques de défenses magiques, les tactiques offensives magiques, la justice, l’éducation les relations démoniaques, et enfin, là où je travaille actuellement, les affaires humaines. Au-dessus d’eux se trouvent le Prophète, c’est le Prophète Raphaël que vous avez rencontré... Pour faire le pacte. »

Avec cette explication, si Flippy ne s’en doutait déjà pas, il comprendrait qu’il y avait quelques démons qui connaissaient leur identité, même si cela était plutôt logique.

Et l'ange tomba à terre

 Erëm ne voulait pas être ennuyeux, et, vraisemblablement, ce n’était pas le cas, Flippy semblait être très intéressé par les informations qu’il venait de lui donner, si bien qu’il avait dit pour lui-même de se les noter. L’ange sursauta presque quand il l’appela « Erem-chan » et il se remit un peu droit dans le mouvement. Il hocha la tête lorsque le rouquin lui demandait s’il avait le droit d’apprendre des anges. Il rougit lorsqu’il l’approcha et eut un mouvement de recul. Il l’interrogea prestement sur les bibliothèques et sur les livres. L’énergie de Flippy était revenue et cela se voyait… Ce n’était pas le cas pour celle d’Erëm en revanche…

« Oui, nous en avons. On peut trouver des livres en n’importe quelle langue sur n’importe quel sujet dans la bibliothèque de l’Ecole de la Communication… Je pourrais vous y emmener demain. »

Clairement, il était beaucoup trop tard. Il décida, du coup, de terminer son explication concernant les plus grosses bases des bases du Paradis. Histoire de mettre le Flippy en appétit et de combler un peu les envies.

« En plus des branches des Conseillers, nous avons ce que nous nommes les Ordres. Légèrement semblables à ceux humains, comme l’ordre des avocats, mais chez nous, ce sont des regroupements de métiers. Nous avons par exemple l’ordre de la santé, des thanatopracteurs, des commerçants, du développement, de la justice, etc. »

Concernant les explications sur l’Académie, il pourrait les donner demain, une fois qu’ils se trouveraient dans les lieux, cela sera beaucoup plus concret. Toussant un peu l’archange reprit son souffle. Doucement, il se leva. Oulala il titubait encore un peu et avait un peu de mal à garder les yeux ouverts mais pouvait bien faire encore quelques petites choses. Il prit des livres en anglais sur les étagères. Dont un pour apprendre l’anglais de façon en anglais, mixant de l’angélique.

« Ce n’est pas grand-chose mais… Ici vous aurez quelques mots d’angélique si ça vous intéresse. Vous pouvez fouiller ma bibliothèque, mais beaucoup sont en angélique. »

Et puis il n’avait pas tellement de livres. Il se dirigeait ensuite vers sa chambre. Il commençait sérieusement à vouloir aller se poser. Il prit deux tenues qui faisaient office de pyjama, un long haut ainsi qu’un pantalon ample, un ensemble plutôt à dominant blanc et l’autre à dominant rouge. Il tendit le rouge, le plus court à Flippy (car il avait un peu moins de muscles que lui). Les deux étaient doux au toucher.

« Vous pouvez vous changer pour dormir, si vous voulez. Vous pouvez prendre ma chambre. »

On venait d’échapper à la mort et on donnait quand même sa chambre à l’invité ? Erëm ne changerait pas… Lui prit la salle de bain pour aller se changer, les habits de démons n’étaient pas très confortables car ils étaient un peu plus petits, il était en effet plus grand sous sa taille d’ange… Lorsqu’il revint, il se sentait au moins plus à l’aise et prit quelques couvertures et coussins dans une armoire avant de les poser sur le lit.

« Je pense que je vais dormir… N’hésitez pas à me réveiller demain matin. Ou à vous servir si vous voulez quelque chose…   »

Il faudrait aussi qu’il passe au marché demain sinon… Il n’allait vraiment rien manger…

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Erëm avait réussi à capter l’intérêt de Flippy avec sa bibliothèque. Il aurait donc certainement la paix pendant la nuit, pour pouvoir dormir. Sans vraiment qu’il n’ait à se répéter, le rouquin comprit qu’il devait le laisser tranquille pour qu’il se repose. Le murmure de la nuit disparaissait donc dans sa chambre. Erëm pouvait donc aller se coucher dans le canapé après avoir éteint toutes les lumières et fermé volets et rideaux. Un bon gros coussin, une couette et le voilà qui en une minute trouva le sommeil. Il ne s’était jamais endormi aussi rapidement et n’avait jamais été aussi épuisé.

La nuit avait été sans rêve. Peu importe ce que Flippy faisait, s’il allait se laver, s’il passait dans le salon, Erëm ne se réveillait pas. Il commençait à faire un peu chaud dehors mais pour autant il était toujours aussi bien dans sa couette. Il ne s’était pas non plus réveillé cette nuit, il avait un peu toussé mais ne s’en était pas rendu compte.

Lorsque son supérieur s’adressa à lui une première fois, il n’entendit rien. Il commença simplement à se réveiller au toucher et lorsqu’il parla un peu plus fort. Ses deux yeux bleus s’ouvrèrent péniblement, si on l’avait laissé, il aurait certainement dormi jusqu’au soir, voire, jusqu’au lendemain matin. Neuf heures de sommeil ne rattrapaient pas une semaine à dormir sans réellement dormir, à se réveiller en sursaut en manquant d’air. Il ne savait pas vraiment quelle heure il était néanmoins les rayons du soleil prouvaient qu’il faisait déjà bien jour dehors, alors, doucement, il se releva.

« Hm… Désolé.. J’ai trop dormi… »

Des excuses dès le matin à son invité qu’il avait un peu forcé à venir ici. Erëm s’assit, la vision un peu troublée encore, il se frottait les yeux. Il paraissait encore bien fatigué. Flippy devait pourtant être pressé d’aller à la bibliothèque et lui il devrait manger quelque chose sinon il allait s’évanouir encore une fois…

« Je vais… Faire du thé… »

S’enlevant de la couette, Erëm se dirigeait vers la cuisine et commençait à faire bouillir de l’eau avant d’ouvrir les rideaux et volets, avec cette légère appréhension de croiser son père. Pourtant, quelle ne fut pas sa surprise en voyant un petit panier à sa fenêtre, avec des fruits, des légumes et de la viande. Clignant des yeux, il l’attrapa. Un petit mot en angélique indiquait Bon courage mon fils et il s’agissait-là de l’écriture de sa mère. Haa… Quel soulagement… Erëm soupira. Pas besoin d’aller au marcher, et pas besoin de trop forcer, sa maman avait pensé à quelque chose d’important. Il rentra le petit panier, mettant la viande au frais avant de mettre les herbes à infuser.

« Je vais pouvoir nous faire à manger. »

Mettant une casserole sur le feu, l’ange commençait à découper les fruits et les légumes pour préparer la spécialité du paradis, la soupe, un peu modifiée, incorporant du sucré et du salé. Par sûreté, il préférait faire une petite compote de fruits à côté pour Flippy, au cas ou il n’apprécierait pas leur spécialité. Une fois que ce fût prêt, il servit le tout, il allait pouvoir reprendre un peu de force car ses doigts avaient tremblés lorsqu’il avait donné les coups de couteau.