Une poupée obéissante || Sulpicia Volkrag

Que remarque-t-on au premier abord chez la jeune démone ?

Certains vous diront sa longue chevelure vermeille qui descend souplement le long de son dos jusqu'à s'arrêter à son fessier, contrastant avec la blancheur de son teint froid. Il paraît qu’elle ressemble beaucoup à sa mère dont elle n’a plus le souvenir, cette dernière étant décédée lorsque Sulpicia était encore très jeune. En haut de son crâne apparaissent deux cornes ébènes de presque trente centimètres, légèrement courbés, à l'instar des mandibules du lucane cerf-volant. Selon la lumière, des sous tons rouges se reflètent sur ses cornes. Quelques mèches cramoisies de chaque côté de son visage rebiquent sur ses pommettes et soulignent sa fine mâchoire tandis que sa épaisse frange effleure son regard.

D'autres vous diront justement que ce sont ses grands orbes lilas pénétrant, agrandis par ses longs cils surmontés d'une légère couche de mascara, qu'ils ont pu remarquer. La fine pupille reptilienne qui semble balayer la scène au moindre mouvement, observant avec vivacité son environnement et ses interlocuteurs pour les analyser, inquisitrice et glaciale. Regard qu'elle tient sans aucun doute de son paternel et de ses aieuls. Pourtant, dans les rares moments où elle baisse sa garde ou que sa carapace se fissure, ses yeux brûlent d'une curiosité pétillante et empreinte d'une certaine lueur de candeur, de naïveté, et à travers leur éclat, trahissent ses désirs de liberté et de penser, qu'elle-même ignore et censure.

Pour les autres, c’est l’absence de sourire chez Sulpicia qui frappe au premier coup d’oeil. Rares sont ceux qui ont pu avoir la “chance” de voir ses fines lèvres s’étirer gaiement, que ce soit avec légèreté ou franchise. Peut-être par mimétisme ou simplement par caractère -probablement un mélange des deux- la jeune herrscher ne montre pas ses émotions, et tout ça passe d’abord par l’expression faciale qu’elle contrôle en ne laissant rien passer (contrairement à son regard et parfois son langage corporel qu'elle ne maîtrise pas toujours). Son visage inspire alors la froideur, une attitude qui peut paraître comme étant arrogante ou sans émotion.

Enfin pour d'autres encore, c'est son apparence globale. De taille intermédiaire, avoisinant le mètre soixante-cinq et d'une corpulence chétive mais aux formes féminines présentes, Sia paraît frêle et délicate pour un démon. D'autant plus que ses vêtements sombres mais très soignés et féminins -appréciant grandement les robes et les jupes-, accentuent son apparence fragile, ce qui n'est pas du tout le cas. Sa démarche est à son image : droite et qui ne laisse pas de place aux faux pas, laissant sur son passage un léger parfum sucré.

Sur Terre, son apparence change légèrement. Ses longs cheveux deviennent plus courts, lui arrivant aux épaules, tout en gardant sa frange mais troquant sa couleur rubis contre l'obsidienne. Ses yeux s'assombrissent également, perdant toute couleur pour se transformer en un noir réglisse. De manière générale, Sulpicia souhaite sous cette apparence passer plus inaperçue, attirant peu les regards vêtue de vêtements sobres et passe-partout.

Spoiler:

 

Sulpicia a compris depuis longtemps que les apparences étaient très importantes et que la faiblesse n'était pas permise. C'est pourquoi, dès son plus jeune âge, la démone s'est forgée une vraie carapace, un masque qu'elle arbore au quotidien et qui ne se détache qu'avec de rares personnes triées sur le volet. A vrai dire, jusqu'à présent, il n'y a qu'avec une personne qu'il s'est fissuré.

Ainsi, tout est une question de contrôle. La jeune herrscher ne laisse rien passer sur son visage, paraissant froide. Telle une machine qui ne peut penser par elle-même, elle obéit promptement aux ordres sans se poser de questions. Enfin plutôt, elle s'empêche d'aller profondément dans les questions qui peuvent l'envahir, les balayant de ses pensées dès leur apparition. Hormis pendant sa période « difficile », elle est naturellement respectueuse et polie, s'adressant avec égard chaque personne qu'elle croise, peu importe son statut social. Son éducation était rude et il n'était pas rare que la démone écarlate se fasse punir, poussant parfois jusqu'à la violence pour lui faire comprendre qu'elle n'avait pas son mot à dire. Si au départ le fait de toujours faire attention à ce qu'elle dit, à sa façon de se mouvoir, à respecter les règles, n'était pas naturel et même fatiguant pour Sia, au bout de plusieurs années c'est devenu un automatisme au point parfois de se dire qu'elle s'était perdue elle-même. Elle manque donc cruellement de spontanéité et de lâcher prise.

Il y a toutefois des traits de sa personnalité qu'elle n'a pas eu besoin de cacher. Depuis toujours, Sulpicia est appliquée, ponctuelle et consciencieuse, elle s'entraîne d'arrache-pied pour être à la hauteur des espérances d'autrui. Petite, elle recherchait la reconnaissance de son père qu'elle n'a jamais vraiment reçu, peut-être est-ce ce même désir qui continue de l'animer secrètement aujourd'hui. C'est aussi quelqu'un de valeureux qui n'hésite pas à mettre sa vie en jeu si c'est ce que l'on désire d'elle, ce qui ne veut pas dire qu'elle n'éprouve pas de peur. Intransigeante autant envers elle-même qu'autrui, elle est guidée par les valeurs prônées par les démons qu'on lui a inculqué. Elle ne supporte pas les tire-au-flanc et les pleutres sans dignité. Il y a quelques aspects d'elle qui lui demandent encore de faire attention, notamment son impatience sûrement dus à son environnement strict et son immaturité. Il lui arrive parfois d'avoir des pulsions d'impatience, surtout lorsqu'elle veut effectuer une tâche au plus vite ou encore lorsqu'elle veut devenir plus forte, quitte à sauter les étapes pour y arriver.

Dans une conversation, la démone se met volontairement en retrait, non pas par timidité, mais pour mieux observer son environnement et ses acteurs. Elle essaye de déchiffrer les attentes d'autrui pour y répondre au mieux, toujours dans cette même perspective : celle d'être utile. Au final, elle ne sait pas vraiment vivre pour elle-même et se plie à la volonté des autres. Pour leur faire plaisir ? Par habitude ? Par facilité ? Par crainte ? Elle-même ne le sait pas et n'y réfléchit pas davantage. Que désire-t-elle vraiment ? Aucune idée de ce côté-là non plus. Ce n'est pas ce qu'on lui demande de toute manière.

Si Sulpicia ignore ce qu'elle pourrait faire d'autre de sa vie, elle a tout de même des choses qu'elle aime et déteste. A part s'entraîner, la jeune herrscher apprécie jouer du violon, boire du thé, et possède un palais sucré. Elle adore les choses sucrées : gâteaux, biscuits, bonbons, fruits... et, malheureusement pour la démone, déteste la nourriture épicée et les légumes, se forçant la plupart du temps à en manger. Souvent, on croit à tort qu'elle a un petit estomac mais sitôt sortie de table, elle se rue dans sa planque pour sortir ses snacks. Sia est aussi très coquette, elle fait très attention à son apparence, notamment à sa chevelure à laquelle elle tient et à ses vêtements.

Lorsqu'elle allait chez sa grand-mère, elle jouait énormément à différents jeux. Elle s'est rendue compte de son attrait pour le jeu, notamment les jeux de cartes. Jouer la fait clairement vibrer, titillant sa curiosité et son goût du risque qu'elle réprime d'ordinaire. Lorsqu'elle se laisse un peu plus aller, on découvre alors une jeune démone au regard pétillant qui fait tout pour gagner -sans pour autant user de coups bas- et qui peut se révéler boudeuse et mauvaise perdante. Sa grand-mère essayait clairement d'ouvrir sa carapace et Sulpicia laissait tomber sa protection, parlant avec beaucoup moins de retenue et de méfiance. Pour autant, elle se heurtait toujours à un mur quand il s'agissait de lui demander ce qu'elle voudrait vraiment faire.

Au final, n'est-elle pas simplement une jolie poupée de porcelaine vidée de sens et qui n'est faite que pour être manipulée ?

 

Sous-Race : Herrscher
Classe : Supérieure, mais niveau actuel moyen
Régénération : Moyenne
Portails maîtrisés : Enfers et Terre
Type d'Aura :  Discrète mais froide, comme une brise
Contrôle du miasme / de l'exaltation : Pas encore bien contrôlé et instable

Pouvoir(s)
Pour l'instant, la jeune herrscher fait apparaître et manipule des orbes d'énergie. Elle commence à créer d'autres formes qu'elle fait léviter.

Elle a appris à se battre avec différentes armes et possède également une épée classique, l'épée étant son arme de prédilection.

Allongée par-dessus les draps de son lit, au milieu d’une multitude d’oreillers confortables qui le décoraient, la jeune démone serrait silencieusement contre sa poitrine sa peluche favorite, un lapin rose dont les couleurs s’étaient estompées avec le temps, ayant perdu de sa superbe mais pas l’amour dans lequel il a été baigné. Le regard dans le vague, fixant nonchalamment l’immense plafond immaculé, ses doigts caressant instinctivement la peluche duveteuse, Sulpicia se replongea dans son passé. Mélangeant les souvenirs agréables avec ceux encore douloureux, les choix qu’elle avait fait, qu’on lui avait imposés, les paroles rapportées, le flou de certains moments… Tout ce qui a fait d’elle la démone qu’elle est aujourd’hui. Une larme coulait silencieusement le long de sa joue.

« Je me rappellerai toujours, tu es née un beau jour de pluie. »

Sulpicia, haute comme trois pommes, écoutait attentivement les paroles de sa grand-mère maternelle qui l’avait prise sur ses genoux. Dans son souvenir, c’était une très belle femme qui avait la même couleur de yeux qu’elle, qui donnait une impression de chaleur, de douceur infinie. C’était d’ailleurs elle qui lui avait offert son lapin préféré et avec qui elle passait la majeure partie du temps, sa mère étant décédée alors qu’elle était encore jeune. Le décès de sa mère a toujours été un flou pour Sulpicia, pendant longtemps elle ignorait de quoi était morte sa mère tout en sachant qu’un démon ne mourrait pas comme ça, qu’il y avait forcément une raison. C’était un tabou dont personne ne parlait dans la famille, comme un omerta. Petite, elle avait bien essayé de comprendre, de poser des questions. Si sa grand-mère semblait esquiver le sujet en lui décrivant la maman de la petite démone, combien elle aimait Sulpicia, son père rentrait dans une colère noire en lui sommant de ne plus en parler.

« Sulpicia, on rentre à la maison. »

D’un ton autoritaire et d’une poigne ferme, il récupéra l’enfant chez sa belle-mère, l’attrapant par le bras pour la tirer. L’air était toujours tendu entre eux. Visiblement, ils ne pouvaient pas se supporter. Sulpicia craignait son père. C’est un démon sévère, strict, qui travaille dans la section stratégie de guerre et qui dégage une aura glaciale. Un Herrscher de classe haute qui a connu le règne de ce “poltron de Satan” comme il le dit si bien. Il n’exprime pas beaucoup ses sentiments, l’impression de devoir toujours être fort qu’importe les circonstances. Les Volkrag se sont enrichis en prêtant allégeance à Lilith en lui rendant service et c’est ainsi qu’ils ont pu s’élever socialement. Son père est tombé amoureux de sa mère qui était une démone de classe moyenne mais dont la beauté l’a envoûté. Sulpicia voyait rarement sa famille paternelle à part lors de grandes occasions. Des personnes guindées, prétentieuses, qui vivaient dans l’abondance en prenant de haut les plus faibles, collectionnant les esclaves comme on collectionne les œuvres d’art. Son grand-père paternel, Alrodus, dirigeait la famille d’une main de fer, contrôlant les moindres faits et gestes de ses enfants de sorte à ne pas entacher la réputation familiale.

A l’image de son grand-père, son père était très rigoureux sur l’éducation et le respect des règles. Quand il était présent à la maison, il laissait peu de place aux loisirs, lui apprenant à se battre, à utiliser ses pouvoirs, à se cultiver bien avant d’entrer à l’académie. Les entraînements étaient durs, Sulpicia finissait souvent épuisée, écorchée mais il n’y avait pas de place pour les faibles chez les Volkrag. Il fallait être digne de la famille. C’est aussi sûrement pour ça que la jeune démone s’est renfermée sur elle, ne laissant rien paraître de ses émotions. Garder l’image modèle et sérieux de la famille. Il n’y avait qu’avec sa grand-mère qu’elle se laissait aller, qu’on pouvait la voir sourire et rigoler. Penser par elle-même, faire ce qu’elle voulait. L’impression de liberté et de briser des chaînes, même si c’était toujours temporaire.

En grandissant, Sulpicia se démarquait des autres élèves par son sérieux et son travail régulier, assidu, en somme une bonne élève. On lui présageait un bel avenir, sans doute finirait-elle dans les hautes fonctions des Enfers. Elle avait cependant des difficultés à se lier d’amitié avec autrui, refusant les relations avec les autres. Après tout, elle ne pouvait pas être amie avec n’importe qui, ses amis étaient triés sur le volet par son paternel. Uniquement des amis avec qui elle aurait à gagner sur le long terme et qui irait dans le sens du destin familial auquel elle devait contribuer inéluctablement. L’argent, la réputation, le pouvoir, tant de mots qu’elle avait entendu maintes fois sortir de la bouche des membres de sa famille.

« Sia… Réveille-toi… Ecoute-moi bien attentivement, je n’ai pas beaucoup de temps. Je suis recherchée et ces chiens vont débarquer d’une minute à l’autre chez moi. Ta mère n’est pas juste décédée, elle a été assassinée. J’ai fait mes recherches et je suis sûre que c’est cet enfoiré de Volkrag qui l’a fait assassiner et qui l’a balancé… Bref, je vais partir ma chérie. Et surtout ne me cherche pas ! Reste en dehors de ça ! »

Tout est allé si vite. En pleine nuit, sa grand-mère avait débarqué dans sa chambre, armée d’un petit sac, le teint pâle, à l’affût du moindre bruit, presque paniquée et lui avait balancé son discours de plein fouet. Sulpicia voulait lui poser des questions, ne comprenant rien à la situation. Tout volait en éclat dans sa tête, n’y comprenant rien à rien, les larmes aux bords des yeux et alors qu’elle s’apprêtait à lui parler, sa grand-mère la prit tendrement et fortement entre ses bras.

« Je t’aime Sulpicia… Et ta mère aussi t’a aimé. Adieu, je suis fière de toi ma puce. »

Sans lui laisser le temps, elle relâcha son étreinte chaude, laissant en mémoire le dernier souvenir de sa grand-mère qui gardait ce même doux sourire teinté toutefois d'une certaine tristesse, les perles salées coulant de son menton pour venir s'écraser sur les mains de la rouquine et la tendresse de sa paume contre sa joue.

Quelques temps après, Sulpicia fut invitée à une réunion exceptionnelle à huit-clos de la famille Volkrag. Etaient présents à ce moment-là, ses grand-parents, paternels, un oncle et son père. Attablés autour d'une grande table rectangulaire, où l'on retrouvait bien évidemment en bout le grand-père paternel, chacun se toisait, cherchant à savoir qui c'est quoi dans le regard des autres. Certains semblaient ignorer l'objet du jour et leur présence, quand aux autres, ils fixaient intensément chaque personne présente comme pour les sonder. En croisant le regard de son aieul, le sang de Sulpicia ne fit qu'un tour. Si l'aura de son père était glacial, celui de grand-père était d'un froid mordant, cherchant à pénétrer les chairs. Il finit par prendre la parole en premier.

« Bien, tout le monde est là. La réunion peut commencer. L'objet du jour est Zitra. »

Sulpicia ne laissait rien paraître quand à l'annonce du prénom de sa grand-mère, étant donné sa visite il y a quelques semaines maintenant et s'étant doutée de la raison de son invitation ici, contrairement à son père qui semblait avoir l'air étonné.

« Zitra... La grand-mère maternelle de Sulpicia ? »

Demanda d'ailleurs son père pour être sûr qu'il s'agissait de la même personne.

« Celle-là même. Décidément Balaar, tu nous auras causé du soucis. D'abord ta femme, ensuite sa mère.  »

Face à la pique lâchée par son frère aîné, Balaar, le père de Sulficia, serra la mâchoire, crispant son visage, les poings serrés sous la table, ne pouvant rien rétorquer. Le grand-père paternel reprit les rennes de la discussion, désignant du regard l'oncle de Sulpicia.

« En effet. Arkan ici présent m'a rapporté que Zitra représentait une menace pour la Reine. Elle aurait des idées politiques disons... Fort fâcheuses. Elle est actuellement recherchée pour haute trahison. Vous n'êtes pas sans savoir que sans Lilith nous n'aurions pas de pouvoir et fort heureusement Arkan possède des relations. Sans lui, nous n'aurions même pas eu vent de l'histoire avant qu'elle ne se répande à travers le royaume, vous rendez-vous compte ? »

Un silence de mort se propageait dans la pièce, seul le sourire vainqueur et fier se dessinait sur les lèvres d'Arkan. Le regard d'Alrodus se planta soudainement dans le regard de notre jeune démone.

« Le problème, c'est que maintenant, il risque d'y avoir des suspicions sur ta fille Balaar. Es-tu responsable de la fuite de Zitra, Sulpicia ? »

« Balivernes ! Jamais ma fille ne me trahirait. »

Pour la première fois, son père la défendait et s'opposait à son propre paternel, à la grande surprise de Sulpicia. Peut-être ne voulait-il pas non plus subir une énième humiliation. Après sa femme, si sa propre fille venait à lui tourner le dos, il deviendrait fou. Alrodus, visiblement offensé, s'emporta d'une voix plus sévère et colérique, rendant de nouveau silencieux son père.

« Ce n'est pas à toi que je m'adresse ! C'est à ta fille que je parle ! »

Même Arkan en avait perdu le sourire, plus craintif soudainement, alors que le coeur de Sia battait à tout rompre dans sa poitrine. Malgré la faiblesse dans ses membres qui n'allaient pas tarder à trembler, elle ne laissait rien transparaître sur son expression faciale.

« ... Non, je n'ai rien avoir avec ça. »

« Bien. Malheureusement, tu sais que ta parole n'a aucune valeur et que si suspicion il y a, tu seras quand même condamnée à la peine capitale. Et il est hors de question que la réputation de la famille soit souillée par ces sottises. C'est pourquoi, j'ai moi-même mis en gage l'honneur de la famille. En preuve de ta bonne foi, tu intègreras la section des chasseurs et rendras service à la Reine en enquêtant et abattant ses opposants. Je sais que tu en as les capacités. Tu dois prendre tes responsabilités. »

A l'annonce de la nouvelle, les grands yeux améthystes de la démone s'écarquillèrent. Jusqu'à présent, elle n'avait jamais eu son mot à dire sur quoi que ce soit, son destin était tracé. Elle devait rejoindre son père dans le même domaine que lui que ça lui plaise au non. Dorénavant, elle devait rejoindre le rang des chasseurs. Elle n'a pas le choix. Elle n'a jamais eu le choix. Elle savait très bien que si elle refusait, on la ferait disparaître avant même que Lilith ou un membre de son camp ne s'occupe de son cas. Alrodus n'était pas un enfant de coeur, des sacrifices sont parfois nécessaires. La fin justifie les moyens. "Ses responsabilités". Sulpicia pensa ironiquement qu'il lui donnait même une chance alors qu'elle n'avait rien demandé à personne. Elle n'avait jamais fait un pas de travers, jamais un mot plus haut que l'autre, jamais au courant de rien et pourtant on la projette dans des situations délicates. Elle n'avait qu'une envie, tout envoyer paitre et partir loin, très loin d'ici. Là où personne ne la connaîtrait, où elle ne rendrait de compte à personne. Et pourtant...

« Très bien, puisqu'il le faut. Je m'engagerai dans la section des chasseurs. Pour l'honneur de la famille. »

« Ah la bonne heure ! A la famille Volkrag ! »

Il claqua des doigts et sa grand-mère, jusque-là présente mais effacée, se leva pour aller chercher une bouteille d’alcool et des verres, levant son verre comme pour trinquer, victorieux et visiblement soulagé face à la réponse de sa petite fille. Ce qui n'était pas forcément le cas de Balaar qui semblait mitigé : à la fois rassuré de sa réponse mais avec une certaine pointe d'inquiétude dans le regard. L'ambiance était soudainement beaucoup plus détendue bien que subsistait de la méfiance. A la sortie du manoir, elle sentit pour la première fois la main forte, maladroite, de son père qui se posa dans son dos, la faisant sursauter sur le coup.

« Tu as pris la bonne décision Sulpicia. »

C’est vrai. On avait des attentes envers elle, elle ne pouvait pas le décevoir. Après tout, c’était la seule famille qu’il lui restait dorénavant. Interdiction de flancher, rester digne et suivre le chemin qu’on lui avait tracé. C’était le meilleur choix à faire, n’est-ce pas ?

« Sulpicia tu vas être en retard. »

De retour brusquement à la réalité, la démone écarlate essuyait d’un revers de main la larme qui avait coulé sur sa joue, reposant la peluche sur son lit en se redressant, remettant en place sa crinière. Elle observa une dernière fois sa chambre, très ordonnée, peu pourvue en décorations futiles, avant de passer le seuil de la porte.

Une nouvelle vie l’attendait désormais.